Bref résumé
Entre silence et mouvement, lumière et ombre : Le photographe sait transformer le quotidien en mondes visuels poétiques. Dans cette interview, il parle de la magie de l'espace intermédiaire, de son amour pour la nature, de l'influence de l'architecture - et de la raison pour laquelle il se définit lui-même comme « Interprète-ographe » (un mot artificiel composé d'Interprète et de Photographe).
Cher Sylvain. Merci beaucoup d'avoir accepté cette interview. Tu trouveras ci-dessous les questions et, en dessous, un espace pour écrire tes réponses.
Sylvain Blanchoud, quelles sont tes exigences personnelles en matière de travail photographique ? Et comment conçois-tu la photographie au sein de l'art - plutôt comme un moyen documentaire, comme un outil poétique ou quelque chose de tout à fait différent ?
Réponse : Chère Yvonne et chère Art24 , tout le plaisir est pour moi car c’est une joie et un honneur de pouvoir participer à cette interview . Mon exigence principale si je puis dire est de faire de mon mieux afin que l’intérprétation visuelle que je propose aux gens soit celle qui corresponde le plus possible à ce que m’a inspiré ou suggéré le sujet au moment de la prise de vue et que le résultat soit le plus artistique possible que ce soit par le travail des couleurs , des ombres ou des lumières ou des mouvements , j’essaye d’éviter ou d’aténuer la banalité de ce que je vois , c’est quelque chose de très important pour moi . Si je trouve une de mes images trop banal je ne pourrai pas la proposer au regards des autres , impossible , trop dur pour moi .
D’ailleurs et là je vais peut-être faire sursauter quelques puristes , je ne sais pas , mais je me considère comme un interprète-ographe , oui c’est un terme inventé mais je l’aime bien et je trouve qu’il correspond plutôt pas mal à mon approche de la photographie . Pour moi la photographie est un véritable couteau Suisse si je puis me permettre la comparaison . Elle peut informer et faire réfléchir à ce qui se passe dans le monde comme dans le cas des images des photographes de press , elle peut aussi instruire si l’on pense à des ouvrages dédiés aux animaux ou aux sciences ou aux divers pays du monde . La photographie à le pouvoir de faire rire aussi , de faire pleurer parfois et de rendre nostalgique d’un temps révolu ou d’une personne que l’on aimait bien . Elle peut aussi déclancher de la colère en certaines circonstances . Elle peut aussi faire tomber amoureux d’une chose , d’un être , d’un animal ou que sais-je d’autres encore . Elle peut aussi permettre de se réconcilier avec soi , de mieux s’accepter , de mieux se connaître .
Et oui la photographie comme moyen poétique pour faire passer ses états d’âme , ses sentiments à un moment donné ou pour embellir simplement ce qu’il y a devant nos yeux . Et mélanger la photographie avec de la poésie afin de rendre moins brutal et moins insupportable certaines scènes quotidiennes ou de l’actualités . La poèsie dans l’image pour se dire qu’il peut y avoir de l’espoir , de l’humanité , de la beauté et de la lumière malgré tout . Oui la photographie est un outil multi-talents capable de choses incroyables et parfois insoupçonnées et c’est pour cela que je l’aime tant et qu’elle me fascine pareillement . J’avoue que parfois son immensité me fais un peu peur également .
J'ai regardé ton travail. En tant qu'historienne de l'art, on essaie naturellement de reconnaître des modèles ou de trouver ce qui rend les tableaux particuliers. J'ai remarqué que beaucoup de tes œuvres montrent différents moyens de transport, que ce soit sur l'eau, sur les rails ou sur les routes.
Dans tes images, le mouvement semble souvent seulement suggéré - comme s'il venait de se produire ou était sur le point de se produire. Par exemple, la photographie des rails de tramway sans tram (« Vue d'un pont du centre-ville de Bern, Suisse »). En même temps, de nombreuses scènes dégagent une profonde sérénité. Les bateaux qui ont accosté au port ou les pêcheurs qui attendent calmement et patiemment une prise en eau libre (« Moment de pause bien mérité pour une mouette, Vaud » et « le vieil homme et la mer, Sardaigne »). Bien sûr, il s'agit d'une part d'une condition technique de la caméra. Néanmoins, je voulais te poser la question suivante :

Qu'est-ce qui t'attire dans ce champ de tension entre le mouvement et le silence - et comment utilises-tu l'appareil photo pour capturer ce moment d'entre-deux ?
Réponse : Oui effectivement j’aime bien photographier les moyens de transports qui se présentent devant moi et leurs passagers qui viennent parfois du bout du monde . J’aime prendre en image des moyens de transport au look et au design qui m’intriguent ou me plaisent ou me fascinent et également ceux qui ont un un aspect vintage qui me rappellent mon enfance et mes visites au musée des transports de Lucerne ou les sorties familiales. J’ai de la tendresse pour les moyens de transport anciens et qui roulent ou naviguent encore car ils auraient sûrement mille et une histoires et anecdotes à nous raconter sur ce qu’ils ont vu , croisés et entendus et endurés pour nous si ils pouvaient parler . Et ces moyen de transport place aussi devant mon objectif des gens , des métiers et des vies auxquelles je n'auraient peut-être pas prêté attention ou que je n’aurais pas découvert sans eux . Des moyens de transport peut surgir la surprise , l’imprévu , l’innatendu .
Ah le mouvement c’est vrai qui j’y suis sensible également . J’essaye de le rendre léger , discret , de bien le dosé et aussi de le placer au bon endroit de l’image selon les cas de figure . A mon grand dam c’est une chose compliquée et délicate et qui ne réussis pas à tous les coups et sur toutes les images . Parfois j’ai besoin ou envie de suggérer un mouvement plutôt mécanique et d’autres fois un mouvement plus proche de la gestuelle humaine et en d’autres occasions un style de mouvement qui puisse ressembler à des feuilles entrain de tourbilloner . J’essaye d’éviter de devoir retranscrire des mouvements brusques , dur , cassants .
L’antagonisme ou la complémentarité selon les scènes entre le mouvement et le silence est une chose fascinante à mes yeux et c’est vrai que je suis attiré par ce genre de mise en scène et de sujets . L’image du pêcheur Sarde est un bon exemple pour illustrer cela de manière plus explicite . Il est figé numériquement devant mon regard à un moment T mais pour que toute cette scène puisse se produire il a fallu qu’il se prépare et se mette en mouvement intellectuellement et physiquement . Le tout accompagné par les mouvements de la nature , les flots de la mer , qui l’a accueilli et accepté le ballet que celui a décidé de mettre en place et de jouer . Et tout cela en silence . Quand je le regardais je pensais au vieux Santiago le pêcheur de Ernest Hemingway et j’espérais très fort pour lui que la fin de sa sortie en mer se termine mieux que celle du vieil homme . Donc pour cette scène là en particulier j’ai suivi le pêcheur depuis ses préparatifs minutieux au port fait de mouvements rapides , précis , silencieux et méticuleux jusqu’au moment de l’embarquement et de sa sortie du port . Et quant il a enfin atteint son but , arrêté son moteur et jeté les filets et qu’il n’y avait plus que lui le ciel et le clapotis des vagues c’est là que j’ai senti que c’était le bon moment pour déclencher .


Les personnes représentées dans tes photos dégagent également une sérénité particulière à mes yeux. Ils flânent (« Promeneur pensif dans les rues de Naples »), prennent le soleil (« La dolce vita, Posilippo, Napoli »), s'assoient et se reposent (« La dame au parapluie, Lausanne, Suisse » ou « La penseuse, Genève »), ou profitent de la vue (« Vue du lieu de promenade, Neuchâtel»). Beaucoup de tes photos montrent donc des personnes dans des moments de contemplation, presque de méditation.
Qu'est-ce qui t'intéresse dans ces scènes intimes du quotidien ? Et dans quelle mesure les considères-tu comme le reflet d'une culture ou d'une société particulière ? Quelle est l'importance de la réflexion et pour soi dans la vie quotidienne ?
Réponse : Je suis attiré par ce genre de scène tout particulièrement quand je me trouves moi-même au milieu de cette sorte de tourbillon humain frénétique à certaines heures du jour et en certains lieux , surtout urbain au moment de la sortie des bureaux . Et dans ces instants là je cherche du regard quelque chose ou quelqu ‘un qui ne participe pas à ce grand bal et qui semble ressentir la même chose que moi . Quelqu’un qui semble à contre-courant des événements . Quelqu’un qui ne fait pas comme les autres . Quelqu’un qui semble regarder et vivre les choses à une autre vitesse et d’une autre manière . Et quelqu’un qui regarde ailleurs .
Et je suis confronté assez souvent à ce genre d’images ce qui me rassure car cela veut dire pour moi qu’il existe encore des gens qui sont capables de voir et de ressentir le monde selon leur propre perception du temps et des priorités malgré ce qu’essaye de nous imposer notre société occidentale . Alors oui pour moi les images que tu sites sont un reflet de notre société actuelle et surtout elles montres que oui il est possible et parfois salutaire de prendre son temps , le temps de regarder et d’écouter ce qui nous entourent même aujourd’hui .





La nuit apparaît plutôt rarement dans ton travail, mais de manière très marquante - par exemple dans « Entre chiens et loups » ou « La Pluie le soir sur Genève ».
Qu'est-ce qui rend le travail photographique de nuit attrayant à tes yeux - et en quoi consistent les défis créatifs et techniques ?
Réponse : La photographie de nuit est quelque chose de particulier et d’un peu à part pour moi . Photographier la nuit me permets de découvrir ou re-découvrir des lieux que je croyais connaître sous un angle différent et de pouvoir y apporter une touche artistique à laquelle je n’aurais pas pensé ou que je n’aurais pas osé utiliser pour une scène diurne . Les conditions météos peuvent aussi totalement chamboulé et transformé une sortie nocturne en quelque chose de mystique ou magique et ça j’adore .
L’obscurité me permet de présenter des endroits qui sont animés le jour et qui peuvent sembler parfois quelconque en des tableaux artistiques ou cinématographiques qui puissent surprendre jusqu’aux habitués du lieux . La nuit me permet de pouvoir découvrir plusieurs rendus de couleurs de l’éclairage public par exemple ,qui pour le coup peut-être chaud , froid , tamisé , diffu ou suggéré . La nuit peut aussi donner de nouvelles formes à des ombres que je croyais connaître . La pénombre me permets d’oser des approches et des mélanges des genres artistiques que je ne me serais peut-être pas permis autrement . J’ai moins peur d’oser la nuit . Et la sérénité du moment me permets de me plonger plus facilement dans l’image et dans ce que j’aimerais retranscrire et proposer aux gens .
Parfois la peur s’invite dans mes safaris nocturne par surprise et là je photographie de manière plus urgente , frénétique , saccadée , moins réfléchies plus proches d’une sorte d’état d’alerte . Mais pour le coup ce sont des images que je ne partage pas ou que je préfère ne pas garder . Le travail photographique de nuit est lié dans mon esprit au cinéma et à la littérature , deux domaines qui me passionnent aussi . La nuit permet d’oser plus facilement la fusion de ces trois genres et je ne me lasse pas de ça .Et les défis créatifs et techniques étaient le plus souvent dû à une météo taquine et changeante et parfois aussi à un matériel récalcitrant à cause du froid ou de l’humidité . Je trouve donc la photo de nuit enrichissante et attrayante.


Tes œuvres oscillent aussi souvent entre l'architecture, la lumière et l'ombre. Ce faisant, tu captes des lieux comme s'ils recelaient des secrets. Tes images révèlent une relation particulière entre l'homme, l'espace et la structure.
Qu'est-ce qui t'intéresse dans la relation de l'homme à l'architecture ? Et quelle force narrative découvres-tu dans le jeu d'ombre et de lumière ?
Réponse : j’aime l’association ombre , lumière et architecture saupoudrée par celle de l’homme . J’utilise la présence de celui-ci dans mes images pour être le prolongement et le complément voir le révélateur de la construction . Si parfois on a l’impression qu’un mystère se dégage d’un lieu , d’un batiment ou d’une scène que j’ai prise ou que l’on a la sensation d’insondable secrets c’est que c’est la manière dont j’ai ressenti le lieu et ce qui s’en dégageait et que j’ai voulu délibérément le faire ressortir . Tout ce qu’il y avait devant moi se prêtait à ça et il me semblait normal de le présenter tel quel . Il me fallait mettre en avant le mystère .
Et la relation homme-architecture me permets d’obtenir des images de nous dans des postures , des positions et des emplacements tout à fait étonnants . Que ce soit à l’arrêt ou en mouvement . l’architecture m’aide aussi pour imaginer de nouvelles façons de voir et de capter ce qui m’entoure . Je l’utilise si l’occasion se présente ou le demande et si je comprends et ressents bien le batiment près de moi . Si je ne me sens pas en phase avec la construction il est rare que j’insiste et essaye de prendre une image . La relation homme-architecture est donc riche d’enseignement , de découvertes et de remise en question concernant l’organisation de ce qui m’entoure et de la perception que j’en ai et de ce que je vais pouvoir en faire dans mon art .
Dans beaucoup de tes photographies, les arbres sont des témoins silencieux dans l'espace de l'image. Ils bordent la route (« Vue du lieu de promenade, Neuchâtel »), surplombent les maisons et entourent les villes (« Vue de la ville de Naples depuis Capodimonte »), apportent ombre et fraîcheur aux arrêts de bus ou entre les rangées de maisons (« Nous sommes désolés pour le retard, Bern », « l'attente amoureuse ? Paris, France » ) ou se reflètent mystérieusement dans les vitrages d'un bâtiment ( « Jeu d'ombres et de lumières, Neuchâtel »). Ils jouent donc différents rôles et servent d'ombres, de contrepoints à l'architecture ou de surfaces de réflexion.
Quel rôle joue la nature dans tes compositions - métaphoriquement et créativement ?
Réponse : Les arbres sont pour moi une chose que j’aime mettre en valeur dès que possible dans mes photos car j’ai pour eux un profond respect et admiration . Peux-être que mon prénom Sylvain y est pour quelque chose , allez savoir ? Les arbres représentent pour moi la sagesse , l’endurance , le temps qui passe , le rythme immuable de certaines choses qui parfois nous échappent et ils sont aussi des gardiens et des sentinels hors-pairs .
Les arbres dans mes images semblent quelque fois nous prendre pour témoins de ce que nous avons crées tout prêt d’eux . Ils ne semblent pas porter de jugement mais des fois on dirait qu’ils n en pensent pas moins et voudraient me dire qu’ils sont plus beaux , plus intéressant et vivant que l’incroyable construction dernier cri que j’ai choisis comme sujet pour mon shooting . Et parfois ils aiment se rappeler à moi au moment du déclanchement de la photo pour me dire eh mon ami ton image ne sera pas harmonieuse et complète si je ne suis pas dessus . Ce sont des acteurs très importants dans mes scènes et je tiens à leur présence .
La nature est un des premiers rôles dans le genre d’images que j’aime prendre . Si ce n’est le premier . Elle a souvent étalé devant moi son génie créatif infinini et m’a proposé des clichés incroyables que je n’aurais même pas imaginé en rêves . La seule limite dans tout ça ce fut moi car je n’ai pas compris ni vu certaines choses qui se passait sous mes yeux et du coup j’ai manqué certaines belles images à mon grand regret . Sans dame nature au revoir la beauté , les suprises et les découvertes . Et l’inspiration en aurait pris un sacré coup .


Quel rôle joue la couleur dans ta photographie - et quand décides-tu consciemment d'utiliser certains univers de couleurs ou de présenter les photographies en noir et blanc ?
Réponse : Le sujet couleurs vs monochrome est un débat qui me questionne et auquel je n’ai toujours pas trouvé une réponse définitive et j’ai comme l’impression que je n’en aurais jamais une . En fait en première intention je shoot presque tout le temps en couleurs car j’ai une passion pour elle et ses innombrables variations . Je peux passer énormément de temps afin de trouver la bonne teinte de celle-ci , celle qui mettra en valeur comme je le veux l’image choisie . Je suis sensible au rendu des couleurs de la marque Hasselblad un peu plus flatteur , riche et doux voir onctueux et d’autres fois à celui plus précis , calibré , chirurgical de la marque Phase One .
J’aime aussi chercher un mix entre différentes variantes des anciens films Kodachrome . Je ne rechigne pas non plus a utiliser le rendu des films anciens Fuji comme la sensia par exemple . Ensuite vient le tour d’utiliser le rendu de certaines toiles de peintres fameux quand les premières solutions ne me conviennent pas . Des peintres comme Hopper , Vermeer ou Van Gogh ce sont souvent eux à qui je recours pour améliorer certaines parties de l’image , si cela est possible bien entendu . Et ensuite si le sujet s’y prête mieux malgré toutes mes tentatives de le rendre spécial en couleurs alors je procède à une conversion monochrome a l’aide d’un logiciel comme photoshop .
Il m’arrive aussi de faire un travail complet en noir et blanc sur demande mais alors dans ces cas là j’utiliserai uniquement un appareil argentique ou si j’arrive chanceusement à en obtenir un , un leica à capteur monochrome . A mes yeux le plus beau , le plus riche et le plus authentique résultat en noir et blanc est obtenu en argentique et il me semble difficile de pouvoir le dépasser . Même si la technologie en capteur monochrome a fait des progrès fascinants . Je dirais que pour moi seul le capteur ccd monochrom s’est approché au plus près du rendu argentique traditionnel . Une des choses qui me frappe et que j’ai constaté dans mon cas c’est que mes images en noir et blanc sont presques doublement appréciées statistiquement parlant par mes abonnés . Elles semblent possèdés à leurs yeux une énergie , une vigueur et une force évocative que je peine encore à obtenir avec mes photos couleurs malgré mes tentatives .

Tes images ressemblent souvent à des scènes soigneusement composées - presque cinématographiques. Comment développes-tu une composition d'image ? Te laisses-tu porter ou planifies-tu certaines structures à l'avance ?
Réponse : Il est vrai qu’au final je tente d’obtenir une scène ou une sorte de tableau le plus complet possible . Il faut qu’il soit aussi harmonieux et équilibré . Quant je regarde dans mon viseur le plus important pour moi est ce qui se trouve au centre , et dès que j’ai trouvé le sujet alors je le regarde très soigneusement pour être certain qu’il en vaut la peine et que j’aurai une chance d’en faire quelque chose de spécial et de pouvoir le valoriser comme il le mérite . Après ça je me focalise sur ce qui l’entoure et là je m’arrête au moment ou il me semble que le tableau est rempli de manière adéquate . Il faut que le sujet principal soit toujours la star et ne semble pas noyé .
Je me laisse porter par le sujet choisis je ne planifie rien , c’est lui qui me dit ou me suggère ce qui semble être le mieux pour lui . Il se peut aussi quand arrivant à la maison j’imagine tout d’un coup une autre version de ce que j’ai vu à l’extérieur . Je n’arrive pas a planifier les choses en photographie car je suis quelqu’un de spontané et instinctif , c’est comme cela que j’ai réussi à produire , créer ou voir certains de mes meilleurs clichés . les rares fois ou j’ai été contraint de planifier les choses pour un shooting je n’ai pas éprouvé de plaisir et j’ai plus eu l’impression de faire du travail mécanique qu’autre chose et le résultat ne m’a jamais plus ni convaincu .

Y a-t-il des photographes ou des artistes qui t'ont particulièrement marqué ou inspiré ? Et dans quelle mesure cette inspiration se reflète-t-elle dans ton propre travail ?
Réponse : Alors côté photographes il y en a eu plusieurs qui m’ont marqués soit par leur travail en général ou par leur façon de voir les choses ou par leur technique . Il y a les classiques bien sûr comme Cartier-Bresson , Doisneau , Lange , Kapa , Maier et d’autres plus récents comme Meyerowitz ou Mccurry . J’ai un faible pour le photographe Allan Shaller qui est un peu plus actuel que les autres pour le coup chronologiquement parlant . Il y a aussi des images que je n’oublierai jamais et qui m’ont fait découvrir et aimé la photographie . Des images souvent historiques . L’image du soldat républicain de la guerre d’Espagne , celle de Robert Kapa pendant le débarquement ou celle d’un prisonnier abattu à bout portant par un commissaire de police durant la guerre du vietnam ou encore celle de la petite fille prisonnière de la terre après l’éruption du Nevado Del Ruiz en Colombie dans les années 80 .
Et j’en oublie tant . Tous ces génies m’ont appris qu’il fallait être curieux , ouvert , aimer découvrir , aimer tout court , voyager , s’émerveiller même et surtout des choses les plus simples et garder son âme d’enfant le plus longtemps possible . Savoir écouter son âme , ses sens et son cœur afin de voir le plus de choses possibles .
Sylvain, merci beaucoup pour ton temps !
Parcourir le monde les yeux ouverts

L'entretien avec Sylvain Blanchoud montre de manière impressionnante à quel point son travail photographique est complexe et réfléchi. Qu'il s'agisse de mouvement et de silence, de lumière et d'ombre, d'architecture ou de nature, ses images racontent des moments de concentration, de pause et de perception fine. Elles invitent à voir le monde avec un regard neuf : poétique, attentif et respectueux du petit comme du grand. En regardant ses œuvres, on ne rencontre pas seulement un décor, mais aussi un état intérieur - et peut-être aussi une partie de soi-même.
Découvrez d'autres œuvres de Sylvain Blanchoud sur son profil chez art24 - et laissez-vous inspirer par des images qui racontent des histoires.
Auteur: Yvonne Roos